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Les tableaux du peintre coréen Lee Hai-Jeon forment un festin de couleurs, de lumières, de vie et d’harmonie. Pluton Magazine est parti à sa rencontre à Séoul.
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Niché au bas de la maisonnette de l’artiste, dans une zone paisible du centre ouest de Séoul, l’atelier de Lee Hai-Jeon regorge de tableaux de toutes tailles. Y entrer c’est être agréablement assailli, submergé de couleurs vives et chatoyantes, déclinées dans une fiesta de formes savamment entrelacées, dans lesquelles un oeil exercé peut discerner d’autres mouvements, d’autres nuances subtiles.
C’est là le génie de cet artiste, cette intuition de l’harmonie et de la lumière, ce don de l’agencement des lignes. Sa vision est unique en son genre, portée par une passion intense pour la peinture et un travail quotidien soutenu. “Je passe la plupart de mes journées dans mon atelier”, explique Lee Hai-Jeon. “J’y peins, je me suis aménagé aussi un petit espace de détente.” Il y reçoit rarement quelques élèves pour des cours particuliers et quelques amis triés sur le volet.
Agé de 60 ans aujourd’hui, le peintre rappelle qu’il a toujours aimé dessiner, “depuis son enfance”. “Mais mon père n’aimait pas trop ça”, concède-t-il. Dans une Corée du Sud en plein boom technologique et industriel où l’on valorise plutôt les carrières scientifiques et managériales, Lee Hai-Jeon tiendra bon et suivra sa vocation créatrice. Après des études d’art à l’université Chugye à Séoul, il s’envole pour Paris en 1983 et s’inscrit aux Beaux-Arts où il deviendra l’un des premiers Coréens diplômés de cette prestigieuse école.
Il approfondit ses connaissances, entre autres, de Claude Monet, Van Gogh, Paul Cézanne, Modigliani, Kandinsky… Ce francophile amoureux de la capitale y passera quatorze années où il fera de nombreuses expositions, notamment au Grand Palais. Après cette longue et trépidante parenthèse à Paris, la réadaptation à la vie coréenne n’est pas des plus faciles. L’artiste finit toutefois par trouver sa place et son rythme dans une scène artistique dynamique mais qui continue de privilégier les peintres locaux déjà « reconnus », en demeurant relativement peu ouverte aux innovations.
« C’est beaucoup de travail et même de douleur pour attirer l’attention du public », confie Lee Hai-Jeon. « Cela est dû à la nature même de l’art et de la peinture en particulier, qui ne sont pas négociables. On se demandera pourquoi je peins… Mais le plaisir que l’on ressent lorsque l’on peint, la satisfaction de terminer un tableau ne sont comparables à aucun autre. Cela apaise l’esprit, et c’est mieux que la célébrité, les gains ou n’importe quelle possession. Toutes les couleurs sont belles, et tous les jours j’ai du plaisir à jouer avec elles. La seule chose qui réjouit mon cœur est une toile ».
Actuellement, et depuis le mois de mai, Lee Hai-Jeon expose 70 de ses œuvres au Musée d’art contemporain Ieyoung, près de Séoul. Mises en valeur sur deux niveaux, les installations seront retirées en septembre. Mais temporairement. Le fondateur et président du musée, Kim Ie Hwan, envisage en effet de compter l’artiste parmi ses collections permanentes. « Ce serait une importante reconnaissance pour moi sur le plan national, et m’ouvrirait sans doute beaucoup d’autres opportunités », estime Lee Hai-Jeon.
Reportage Philippe Triay.
Pluton-Magazine/Séoul/2017.
Vidéo d’une exposition de Lee Hai-Jeon en 2012