Une fois n’est pas coutume, nous commencerons Entre les lignes avec un extrait de L’avocatesse, tome 3 et fin de la trilogie qui met en scène le monde juridique.
L’avocation-L’avocature- l’avocatesse
Comme l’extrait le souligne, Aurore Boyard manie à la perfection la présentation des affaires portées devant la cour de justice. Pas étonnant quand on sait que l’auteure elle-même est avocate et inscrite au barreau de Toulon. C’est donc un environnement et une ville qu’elle connaît bien puisqu’une bonne partie de l’histoire se passe à Toulon.
Extrait
Léa demeurait ébahie par l’attitude de son confrère. Comment pouvait-on laisser des clients encaisser seuls le choc d’une condamnation? On oublie trop souvent que la famille des meurtriers ressent une certaine culpabilité des actes commis par leur proche. Consciemment ou non, ils se disent toujours qu’ils en sont en partie responsables, qu’ils ont dû commettre des erreurs dans leur éducation ou dans leur relation avec le comdamné. En sus, ils sont souvent victimes de la vindicte populaire et parfois traités comme des pestiférés.
Léa ne pouvait donc s’empêcher d’avoir de la peine pour cette femme qui devrait, après le choc de ce soir, continuer à vivre avec ce drame. Car le coupale resterait, malgré tout , son fils.
À première vue, on aurait pu penser qu’un roman autour du monde juridique, quand on connaît la lourdeur légendaire de tout ce qui touche au droit, serait ennuyant et rébarbatif et surtout compliqué à suivre, car truffé de termes incompréhensibles, à moins d’être juge, avocat, etc. Il n’en est rien.
L’écriture est incisive, les descriptions très claires, les personnages bien ficelés et tout cela est mené avec un grand humour. Aurore Boyard tisse avec minutie ses personnages, les rend attachants, et au fur et à mesure que l’histoire se déroule, on se prend de passion pour certains. Les dossiers et les affaires en cours sont aussi suivis par le lecteur sans qu’il en perde le fil. Nous découvrons Anne et Léa, deux personnages clés. Nous disons découvrir, car c’est volontairement que nous avons commencé par le tome 3. L’auteure met en scène des femmes mais qui évoluent surtout dans un monde d’hommes et il est vrai également que ce milieu d’avocats, à moins d’y être plongé, reste très mystérieux pour le commun des mortels. Nous apprenons des choses, mais nous rencontrons aussi des surprises sur sa manière de fonctionner.
Il peut donc paraître curieux de commencer une trilogie par le tome 3, mais nous vous assurons que dans ce cas-là, on peut très bien le faire, car un travail éditorial d’accompagnement du lecteur a été effectué et toutes les fois que des doutes subsistent ou viennent entacher la compréhension du texte, un rappel est notifié sur les précédents tomes. L’ouvrage comporte suffisamment d’annotations pour comprendre l’histoire. Et c’est même un exercice amusant.
Alors, de quoi s’agit-il ?
Nous avons Léa qui a un bébé, Paul, et qui a rompu avec le père de son fils. Lui est à Paris. Léa travaille dans le cabinet d’Anne, la patronne, donc, qui paraît psychologiquement normale, mais est en fait la plus vulnérable des deux. Anne a aussi des enfants. Tout cela paraît banal mais sert d’ingrédient à deux choses. En premier lieu, montrer comment les femmes qui exercent ce métier-là et ayant la charge de dossiers très lourds arrivent à concilier une vie de famille et une vie professionnelle. En second point, permettre de mieux découvrir le monde juridique sous un autre angle. Mais, nous n’allons pas vous dévoiler toute l’histoire.
Le roman fonctionne autour de ce parallélisme Mais, l’auteure ne se cantonne pas qu’à cela. Elle distille au lecteur des informations sur les réformes en cours, apporte sa vision des choses, sur les rapports entre juges, avocats et avocates, mais elle instruit aussi le lecteur sur la façon dont on traite un dossier juridique.
Bien entendu, il y a la vie réelle des personnages que nous découvrons au fur et à mesure, mais Aurore Boyard fait intervenir l’actualité, comme les attentats en France et les ressentis de ces agressions nationales, tels qu’éprouvés par le corps juridique, et c’est bien réussi. À aucun moment le lecteur n’a envie de déposer le roman, car les informations données sont suffisamment bien dosées pour permettre de le garder attentif jusqu’à la fin.
C’est donc la structure du roman et la façon dont l’auteure a traité ses personnages qui rendent ce roman unique et pousseront sans le moindre doute le lecteur à courir se procurer les deux autres tomes pour découvrir d’autres aventures judiciaires mais surtout compléter le portrait psychologique des personnages.
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Dominique Lancastre (CEO Pluton-Magazine)
Secrétaire de rédaction: Colette Fournier (Lyon)
Entre les lignes Pluton-Magazine/2018/Paris 16eme