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Le premier et le second choc pétrolier avaient poussé les compagnies aériennes à former des alliances dans le but de surmonter les pertes énormes liées à l’achat de carburant. C’est ainsi que l’on assista à une série de formations d’alliance et de codeshare (vols en coopération).
Les usagers se trouvèrent alors confrontés à une série de hubs (plaques tournantes) aux USA, en Europe et en Asie. Les compagnies qui avaient déjà une forte présence sur des continents ont renforcé cette prédominance. Pour un usager, aller à Quito en passant par Madrid au départ de Londres devenait incontournable car ouvrir une destination Londres-Quito ne serait pas rentable pour une compagnie aérienne.
De même la fameuse route Kangourou (route Australienne) devenait un sérieux challenge si on ne voulait pas passer par Singapour. Singapour créa alors Singapour Airlines, une compagnie d’une grande réputation, incontournable pour rejoindre l’Australie.
Aux deux chocs pétroliers suivirent une série d’incidents qui fit voler en éclat certaines compagnies. Je cite la guerre du Golfe, le 11 septembre aux USA, la guerre en Afghanistan et j’en passe. Bref, les compagnies aériennes ne savaient plus où donner de la tête ou bien des ailes. On changea le service, les routes, on ferma des bases, on ouvrit des compagnies Low Cost (à moyen coût). Celles-ci sont en fait de grosses compagnies aériennes, que ce soit pour les voyageurs lambda (Transavia d’AF) ou Opensky (BA) pour les Business Voyager. Une possibilité d’offrir du voyage Low Cost mais aussi avec un personnel ayant des conditions salariales de moins en moins avantageuses. Mais, ces compagnies se trouvent confrontées à de nombreux problèmes financiers actuellement car elles sont en compétition avec des mammouths du Low Cost, par exemple Easyjet ou Ryanair. Il devient de plus en plus difficile de tenir une compagnie aérienne à flot avec une balance positive. Car, un avion rempli ne veut pas dire une compagnie qui gagne. Ce qui est le cas des compagnies aériennes qui desservent les Antilles françaises.
Les passagers business et premières sont les principales sources de revenus pour une compagnie aérienne. Les compagnies aériennes traversaient certes une période de crise mais les commandes d’avions gros porteurs tels que l’A380 (Superjumbo d’Airbus) ou encore le Boeing 787 (Dreamliner) laissaient présager une augmentation future du trafic aérien. Au niveau des Antilles françaises, il y avait toujours l’éventuelle entrée d’une nouvelle compagnie aérienne, qui reprendrait le réseau caraïbe de la compagnie Air Caraïbes. La construction d’une nouvelle aérogare à Pôle Caraibes ainsi que la naissance de cette compagnie aérienne desservant les caraïbes et l’Amérique du nord laissaient présager une demande de main d’œuvre locale. Cela impliquait également la nécessité de former de nouveaux agents sol et air. Aussi, le manque de main d’œuvre qualifiée aux Antilles a été illustré par la création de la base Paris de PNC Air Caraïbes, alors qu’ils étaient au départ essentiellement antillais.
On parlait de stagnation du marché de l’emploi dans le milieu aérien, et donc un faible recrutement dans ce secteur ces dernières années dû notamment à l’informatisation des procédures au sol. Mais le besoin de personnel se fera quand même ressentir, même si les postes ont changé à cause des départs en retraite et à l’augmentation du trafic passager au sol et en l’air.
Cependant, les compagnies Low Cost n’hésitent pas à lancer des campagnes de recrutement massives. On a comme exemple la récente campagne de recrutement de Vueling filiale d’IAG (International Airlines Group)
New York reste la liaison la plus rentable pour une compagnie aérienne. En raison du business mais aussi il est plus facile de rentabiliser les avions car l’équipage reste très peu de temps sur place. Un avion qui part pour Sydney revient à la base quatre jours plus tard. Pendant ce temps, l’appareil reste au sol à cause du décalage horaire et l’équipage dort dans des hôtels alors qu’il devrait voler. Tout cela coûte une fortune.
Aux émirats, pays du soleil et du pétrole, on assista à une consolidation des compagnies ou créations de compagnies. Je cite Émirates, Qatar Airways, Etihad et les autres qui changèrent leur flotte, passèrent des commandes d’avion à n’en plus finir pour le plus grand bien d’Airbus d’ailleurs. Le pétrole coule à flots que voulez-vous ! Mais le bonheur des uns fait le malheur des autres et il arriva ce qui devait arriver.
Les émirats se positionnèrent aussi en achetant des immeubles en Europe, en participant à de grands projets (exemple tour de Londres), etc. Le résultat est flamboyant en quelques années les émirats ont détrôné les hubs existant et ont réussi par le jeu des alliances à faire du Golfe un passage obligé vers l’Asie et l’Océanie. C’est ainsi que depuis avril 2013 pour aller en Australie on passe par les pays du Golfe et probablement pour aller dans d’autres pays d’Asie très bientôt.
Paris–Bangkok via le Golfe avec Etihad existe déjà et propose un service battant toute concurrence. On caresse les passagers fortunés dans le sens du poil avec des salons high tech et un service hors aéroportuaire (service limousine par exemple) de plus en plus en vogue.
La compagnie nationale britannique British Airways qui avait une alliance de plus de dix ans avec la compagnie nationale australienne Qantas vient de divorcer pour se marier avec le Qatar. Qantas se marie avec Emirates. Quant à Air France, elle ne pouvait que s’associer à Etihad pour ne pas rester en arrière dans cette course. Reste à savoir la position de la Chine car elle aussi a besoin de se déplacer et de se déplacer loin, surtout en Afrique.
De l’autre côté de l’Atlantique, les Américains font le ménage entre eux par exemple American Airlines avale US Airways. On brosse les vieux logos et on se lance dans une nouvelle image plus dynamique dans le but de conquérir les usagers déjà perdus dans les différentes options qu’on leur propose sur ces vols.
Dans un contexte économique et financier aussi fragile, les grands gagnants dans cette histoire sont les compagnies des pays du Golfe qui, malgré toutes les secousses planétaires, ont réussi à déplacer le centre financier chez eux et sont en train de devenir incontournables en dépit de l’instabilité politique dans cette région du monde. Un développement spectaculaire et offensif en dix ans. Près d’un tiers du marché européen conquis. Reste à conquérir le marché transatlantique que les américains dominent depuis plus de cinquante ans. Les compagnies aériennes du Golf ne lésinent pas sur les moyens publicitaires pour attirer l’attention.
On comprend donc l’inquiétude des compagnies aériennes européennes qui doivent compter avec les fluctuations du prix du pétrole, un personnel très difficile à convaincre de l’intérêt pour de grands changements dans la structure et le management de ces compagnies. Grèves, mécontentements en perspective. Incompréhension de part et d’autre surtout que les résultats financiers affichent le contraire. Mais, le marché de l’aviation est un marché volatile. Ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera peut-être pas demain surtout en période trouble où le terrorisme et les guerres dominent les devants de la scène mondiale.
Dominique Lancastre
Pluton-Magazine/2015