Once upon a time : « Ils venaient du Levant »de Georges Fayad.

Par Dominique Lancastre

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Avec « Il venait du Levant », l’auteur Georges Fayad nous offre un captivant récit historique qui se déroule en toile de fond des prémices du conflit de Suez en 1956. C’est une autre Égypte que nous découvrons avec l’histoire Hiléna que des circonstances particulières vont l’entrainer en exil.

Comme dans la plupart des romans historiques, l’auteur nous conte l’autre versant de la guerre en mettant en évidence la souffrance des gens à l’époque. Cependant, ne vous méprenez pas : il ne s’agit pas d’un roman centré exclusivement sur le conflit armé, mais plutôt sur ses conséquences, qui sont similaires à celles de toute guerre.

Ici l’auteur aborde le problème de traditions et leurs effets sur une société à l’orée de la modernisation. Pas de modernisation matérielle, mais sociale. Le Dr Youssef le protagoniste est très attachant. Le Capitaine Anwar et l’infirmière Nougma, tous deux envoyés au front. Nougma donne la difficile mission au Dr Yacoub son patron à l’hôpital, de prendre soin d’Hiléna en cas de malheur.

« Ils venaient du Levant » est un roman qu’on prend plaisir à lire. Georges Fayad nous distille des informations au fil des pages et invite le lecteur à prendre part à ses investigations. C’est un roman qui nous invite aussi à la réflexion sur un monde différent. Chaque personnage est attachant et le lecteur est rapidement entrainé dans les divers aléas de chacun.

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« En effet, j’étais chirurgien-dentiste et le docteur Youssef pourrait bien être un peu moi. Dans la réalité, ce roman démarra dans mon cabinet il y a environ 18 ans, à l’époque où j’exerçais et que ma littérature se résumait à mes ordonnances.

Une patiente dont la couleur de peau et la morphologie dénonçaient une origine éthiopienne ou somalienne vint m’y consulter. Elle me dit ceci en entrant : « Je viens chez vous parce qu’on dit que vous êtes très gentil avec tout le monde. Vous ne faites pas de différence. ». Je compris ce qu’elle voulait dire, mais n’y attachai aucune importance, soucieux d’éviter les ragots et les polémiques.

Au fur et à mesure des consultations successives, des liens se créent toujours, et certains sujets de conversation souvent inattendus s’invitent. Ce fut ainsi que nous abordâmes celui de l’excision. Elle me le décrivit agressif et néfaste, mais, soumise aux lois de la tradition, à aucun moment, elle ne put réfuter sa pratique ou prendre parti pour son interdiction !

Le processus du déchiffrage de ce mystère s’enclencha immédiatement dans ma tête et me hanta jusqu’à ce jour où je me décidai à interroger la littérature. »

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« Depuis cette conversation avec ma patiente, ce sujet n’a jamais cessé de m’intriguer. Aussi, j’ai grandi au Cameroun où j’avais entendu parler de cette pratique dans certaines régions du pays. Disons que j’y étais déjà sensibilisé, mais je n’évaluais pas ou plutôt, j’ignorais l’adhésion des femmes elles-mêmes à la pérennité de cette tradition, la rattachant à la notion de sagesse et de pureté, et cela en dehors de toute conviction religieuse. Cette adhésion intuitive, mais irrationnelle, n’est rien d’autre qu’une double peine pour elles-mêmes.

À partir de là, respect, éclairage et pudeur s’imposent.

D’autre part, au bout du bistouri de tout chirurgien, prime l’objectif du bien-être consécutif… Comment donc ne pas être particulièrement heurté ? »

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« La renaissance sociétale dite Nahda naquit entre l’Égypte, le Liban, la Syrie et la Palestine. Elle fit émerger, particulièrement en Égypte, des femmes héroïques pour s’opposer à cette tradition et également pour accéder au sommet des milieux littéraires et artistiques. Elle fit aussi émerger des hommes politiques qui ont eu le courage de réclamer leurs droits sur le canal de Suez, exploité depuis près d’un siècle par la France et la Grande-Bretagne.

L’hypocentre de ce séisme, l’Égypte, ne pouvait devenir que le lit naturel du cours des événements de mon livre. »

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« Je me suis rendu compte que tous mes livres racontent une histoire dans un contexte historique, ce dernier, politique ou tout simplement sociétal. C’est donc le penchant de mon expression littéraire, voyager à travers une romance et comprendre son voyage et ses messages.

S’ouvrir à une autre source d’inspiration ? Pas impossible. »

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Georges Fayad, né au Liban le 25 03 1948 . Expatrié vers le Cameroun en 1956, il y fait ses études primaires puis secondaires au collège de Mazenod à Ngaoundéré. Il intègre en 1967 la faculté de médecine de Bordeaux et obtient son diplôme de docteur en chirurgie dentaire en 1973. Il se mit à l’écriture après son premier ouvrage remarqué au prix Scriborom 2010 aux éditions du Masque d’Or. ( Éditions Balland)

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Pluton-Mag Littérature 2025. Once upon a Time.

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