Originaire de Tunisie, Mehdi Benna est chercheur en planétologie et ingénieur en instrumentation spatiale à la Nasa, le Centre aéronautique et spatial des Etats-Unis. Ingénieur option ingénierie électrique et titulaire d’un master en sciences (électromagnétique et télécommunications), Mehdi Benna a également obtenu un doctorat en études spatiales de l’université de Toulouse en 2002. L’année suivante, il bénéficiera d’une bourse de recherche post-doctorale dans un laboratoire de la Nasa, avant d’intégrer définitivement le Centre spatial américain en mars 2006. Mehdi Benna est le récipiendaire de nombreuses distinctions honorifiques et a publié des dizaines d’articles dans d’importantes revues scientifiques. Il a accepté de répondre aux questions de Pluton-Magazine.
Comment définiriez-vous votre métier de scientifique, planétologue et ingénieur spatial ?
Mehdi Benna : Tout d’abord, il est important de distinguer les deux corps de métier : un planétologue est un chercheur scientifique spécialiste dans l’étude des objets du système solaire, à l’exception du soleil lui-même. Le champ d’étude du planétologue s’étend des planètes géantes jusqu’aux minuscules grains de poussières qui peuplent l’espace interplanétaire, tout en passant par les comètes, les astéroïdes, les lunes, et autres astres de notre système solaire. En tant que planétologue, je me focalise sur l’étude des divers types d’atmosphères qui englobent les planètes, les lunes glacées, et les comètes. D’un autre côté, je suis un ingénieur en instrumentation spatiale, où j’aide à concevoir, à fabriquer, et par la suite à opérer des instruments scientifiques à bord de sondes spatiales. Les deux métiers sont évidemment complémentaires même s’ils nécessitent à la base des formations académiques assez différentes. L’ingénieur construit les instruments et les sondes spatiales que les planétologues utilisent pour conduire leurs recherches et faire leurs découvertes scientifiques.
Quelle est votre activité au quotidien ?
Mon quotidien se partage souvent entre les deux métiers. Par exemple, une partie de ma journée peut être dédiée au dépouillement et à l’analyse des données recueillies par les instruments de la sonde Messenger en orbite autour de la planète Mercure, alors que le reste de la journée est consacré aux tests électroniques du nouvel instrument d’analyse chimique qui sera débarqué dans deux ans sur Mars par la sonde européenne ExoMars.
Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?
Actuellement, mon temps en tant que planétologue se divise entre l’étude de l’atmosphère ténue de Mercure et de notre lune, l’étude de l’interaction du vent solaire avec l’atmosphère de Mars, et la modélisation des atmosphères raréfiées des lunes glacées de Jupiter et de Saturne. En tant qu’ingénieur, je dirige l’équipe qui opère au quotidien l’un des instruments de la sonde Maven en orbite autour de Mars. Mon équipe est aussi chargée de la conduite des opérations de l’instrument de chimie analytique du véhicule itinérant Curiosity sur Mars. En parallèle, nous mettons les dernières touches à l’instrument d’analyse chimique qui sera embarqué par le véhicule européen ExoMars en 2018.
Qu’est-ce qui vous a amené à choisir ce métier et qu’est-ce qui vous passionne dans votre activité ?
La recherche spatiale en général m’a toujours captivé. Je trouve que l’idée de pouvoir construire une machine qui, une fois lancée dans l’espace, peut parcourir des millions de kilomètres pour nous révéler des mondes exotiques et nouveaux très fascinante. Je suis également passionné par l’aspect humain dans mon travail. En effet, j’ai la chance et l’immense privilège de pouvoir travailler tous les jours aux côtés de chercheurs et ingénieurs de grands talents qui partagent la curiosité et la passion que j’ai pour ce métier. Même si on l’oublie souvent, la recherche spatiale est une aventure humaine avant d’être une quête scientifique et technique.
Interview par Philippe Triay ( Grand Reporter)
Dirigée par Dominique Lancastre (CEO Pluton-Magazine)