Cette nuit-là, dans les pas de Sissi, un somptueux mariage entre Paris et Vienne…

 

 

Le Bal des Parisiennes, le bal viennois de Paris.    

                

logopluRusse d’origine, Natalia vit et travaille à Paris et se glisse dans l’un des groupes de danseuses en préparation dans l’un des salons. Je lui demande où est son compagnon, elle éclate de rire : «  Non, non, pas ici ! »  – Mais vous allez trouver un cavalier, alors ! – On verra ! » Elle me dit avoir déjà participé à différentes compétitions mais que c’est la première fois dans ce cadre évocateur de contes de fées qui l’impressionne. Mais impatiente, sûre de son pas, elle s’éloigne dans sa jolie robe bleue. Des robes de princesses, il y en a ! D’ailleurs, les festivités vont commencer par un déploiement de robes de bal ; le défilé est placé sous le patronage du styliste et costumier Virgil Venak qui a travaillé pour les plus grandes maisons parisiennes, comme Yves Saint-Laurent, notamment. C’est une belle opportunité aussi pour de jeunes créateurs et créatrices de présenter ce soir la robe de bal de leur conception. Danseur soliste de la troupe de Maurice Béjart et lui même chorégraphe à la tête de sa propre compagnie,  Guillaume Bordier a imaginé la chorégraphie du défilé.

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Que seraient des valses viennoises sans la tradition des robes parisiennes ? Alors, il y aura un défilé en trois tableaux, sur le thème de Peau d’Âne : robes de temps, robes de lune, robes de soleil. La ville de Vienne, partenaire officiel de l’édition, offrira le traditionnel cadeau aux dames : une magnifique broche dite Sissi.

BAL N° 2 jeune coupleAutre salon, autre groupe enthousiaste ; à l’évidence, ici,  on se connaît. Voici un jeune couple, Anastasia  et Dandy, formé pour la première fois dans cet écrin et dans le cadre du bal, me  dit le jeune homme d’origine indonésienne, né à Djakarta, qui a grandi à Paris et est ravi d’y participer. Pour la jeune ukrainienne, installée à Paris depuis quatre ans, c’est aussi une première, elle s’est entraînée toute l’année, elle a de solides bases de danse, classique et de salon. « Ce n’est pas mon cas, explique Dandy,  j’ai dû faire honneur à son niveau de danse et c’est pour moi ce soir le plus beau challenge ».

 

 

Une vie parisienne, chère à Offenbach.

 

BAL N°3 détail et lustre de la coupoleNous sommes à deux pas de l’Opéra. Le cadre où le bal se déroule est somptueux, c’est celui du Grand Hôtel de Paris Intercontinental, ancien Grand Hôtel de Paris et plus précisément celui du fameux salon Opéra, sous une rotonde étincelante de lustres où l’architecture délibérément théâtrale offre une succession de balcons et de colonnades magnifiques. Dans ce site classé aux monuments historiques, fleuron de l’architecture du Second Empire,  au XIXème siècle, de grands noms se sont attardés : Victor Hugo, Émile Zola, Guy de Maupassant… et plus tard ce lieu d’excellence a vu aussi passer Marlène Dietrich, Yves Montant, Maurice Chevalier et bien d’autres…On y résidait, on venait y travailler, mettre en scène. Le prestigieux établissement a connu un certain art de vie à la parisienne, fait de raffinement, de joie de vivre, héritage d’une époque où les quadrilles, les valses et les polkas rythmaient la Vie Parisienne chère à Offenbach.

 

BAL N°4 repas de galaPas moins de sept cents personnes sont attendues, danseuses et danseurs, visiteurs qui se succèdent sur les marches du 3, rue Auber, dans le 3ème arrondissement de la capitale où le bal débute sitôt après le grand dîner de gala. À la table d’honneur, parmi les personnalités, figurent les représentants de la république d’Autriche. A été annoncé aussi un certain… Stéphane Bern, mais qui ne viendra pas, il a un mot d’excuses : le célèbre journaliste et auteur, passionné comme on le sait d’histoires de souverains et autres princes, est retenu par un projet sur lequel il s’investit depuis plusieurs années et qui lui tient à cœur : la restauration, dans le Perche, d’un collège royal des siècles passés, avec l’inauguration, ce samedi précisément, du musée qui y est attenant. Mais, promis ! Il sera là l’année prochaine pour la nouvelle édition de la brillante soirée parisienne…

 

Une vie parisienne, chère à Offenbach.

 

Plus loin, dans des robes de haute couture qui n’ont rien à envier aux salons viennois, elles sont trois qui trépignent aussi (on peut les comprendre) : Clotilde, Diane et … Anastasia que je retrouve. Beaux éclats de rire : je ne l’avais pas reconnue, elle venait de changer de robe ! Ce soir, c’est une première ici aussi pour chacune d’elle qui exprime sa chance d’être là,  avec la ferme intention d’en profiter au maximum, car : « C’est une année de travail, soixante- dix heures de cours de danse, tous les quinze jours, des stages de danse le week-end, beaucoup de répétitions en groupe surtout, on fait ça dans divers endroits de Paris, on loue aussi des salles de danse pour être à l’aise, se préparer dans de bonnes conditions et l’objectif, c’est d’apprendre à valser, pas seulement avec notre partenaire mais dans un ensemble, c’est l’effet  chorégraphie qui prime. »  Danseuses et danseurs sont issus de divers milieux d’activité, il y a des étudiants et beaucoup de jeunes professionnels de la danse.

 

BAL N°6 discours mr de Lauzun BAL N°5 les trois danseuses

 

 

Avec le Ballet de l’Opéra National de Paris.

 

Nous retrouvons bien sûr les traditionnels discours de bienvenue et de remerciements, ce à quoi s’applique Charles de Lauzun, lequel a porté avec son épouse, Hélène, ce beau projet à bout de bras. Mais il tient à insister  notamment sur le fait que la soirée est placée sous le signe de la Fondation Espérance Banlieues qui disposera à la rentrée prochaine en France d’un réseau de neuf écoles dont les objectifs sont d’agir et de lutter contre le décrochage scolaire et de transmettre l’amour de la culture française.

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La Marche d’Ouverture s’ouvre sous un tonnerre d’applaudissements, avec l’introduction de Flots de joie, d’Émile Waldteufel. S’ensuivent le défilé de robes, le Récital d’Opéra sur des airs célèbres, via le brillant Duo de la Gantière et du Bottier, accompagné par l’Orchestre du Campus d’Orsay ; puis les quarante débutants du cru 2016 s’élancent pour une polka enivrante d’Émile Waldteufel sur une chorégraphie de Charles de Lauzun, relayés ensuite par les danseurs du Ballet de l’Opéra National de Paris, sur la célèbre partition Humoresque, d’Anton Dvorak. Mais l’humour est également bien présent sous la coupole puisqu’en clin d’œil à la coupe d’Europe de football, des sifflets d’arbitres  saluent la Valse des Débutants afin d’accompagner ces derniers à l’échauffement…

 

BAL N°7 danseuses BAL N°8 danseuse

 

« Un véritable engouement pour les danses de salon, en couple principalement »

 

Tout au long de cette longue soirée, sans souffler un instant, la présidente du Bal des Parisiennes, Hélène de Lauzun, s’est affairée ici et là ; il fallait que tout soit parfait et cela l’était quand j’ai pu enfin m’asseoir à ses côtés. Cette universitaire brillante, ancienne élève de l’École Normale Supérieure de Paris, a enseigné la littérature française à Harvard. Auteur d’une thèse reconnue sur les relations diplomatiques franco-autrichiennes dans l’entre-deux guerres, elle a repris et développe depuis deux ans, l’école de danse « Votre Bal/Votre Valse », fondée avec Charles de Lauzun, lui aussi universitaire (Paris, Harvard, Cambridge), consultant en stratégie financière et passionné de communication.

  • – Une aventure qui a commencé dans ce cadre,  il y a peu de temps ! « Oui, dans sa forme actuelle, le Bal des Parisiennes en est à sa 2ème édition, me dit-elle, une entreprise qui est jeune, qui fédère tous ces passionnés que vous voyez là, née de la passion de la valse. Dans notre école créée en 2009, nous avons rassemblé progressivement un public de personnes impatientes de trouver des occasions de pratiquer, à cela s’est ajouté le fait qu’il y a aujourd’hui un véritable engouement pour les danses de salon, en couple principalement. Le « marqueur » TV que vous connaissez, « Danse avec les  Stars », en est l’illustration même ; et ça, c’est quelque chose qui aujourd’hui trouve écho dans de nombreuses salles de danse. Nous, nous en faisons l’expérience dans notre école, parce que nous y avons un public globalement très jeune, une moyenne de quarante ans. Et on les retrouve ici ce soir. Avec de plus jeunes débutants qui ont entre vingt et trente ans ».

BAL N°9 Me de Lauzun–Tout ça est encourageant ! « Assurément, mais c’est un projet jeune qui est exigeant, il a besoin de remporter l’adhésion de chacun comme par exemple le fait de s’habiller, de porter une robe longue pour les femmes, le nœud papillon pour les hommes, etc. Ce sont des choses qui étaient assez fréquentes jusque dans les années 70 et en perte de vitesse dès 1990, on doit donc réapprendre tout ça, si l’on veut être dans l’esprit de la valse des grandes heures. Mais ce qu’on relève, nous, avec grand plaisir, sur le terrain, c’est cette soif de retrouver en effet tout cela, autour de l’élégance. En tout cas, la pédagogie est bien dans notre projet, car c’est par l’enseignement qu’on en est arrivé là, oui, c’est vraiment encourageant quand on voit le résultat ici ce soir ».

 

« A peine entré, je me lançais dans le tourbillon de la valse… »

 

Dans l’imaginaire populaire, la valse incarne le rêve d’un certain accomplissement de soi, de l’assurance, du bien-être, de la grâce surtout, et c’est un fait que l’engouement est croissant, vu les chiffres de fréquentation de l’école spécialisée dans la valse et n°1 sur ce segment, qui «  sert » 400 mariages par an et initie 150 élèves formés en groupe à la valse viennoise. Des centaines de mariés viennent y frapper à la porte chaque année et depuis 2009, pas moins de 2000 couples mariés sont entrés dans la valse…

 

Isabelle Grozelier, qui est en charge des relations publiques, assurément passionnée elle-même, ne cache pas sa joie de contribuer à rendre ainsi au Salon Opéra, conçu comme une salle de bal, sa vocation initiale, avec toute la majesté et la splendeur qui découlent d’un pareil lieu : «  On revient sur la tradition des valses parisiennes d’autrefois, est-ce qu’on l’a recréée ?  Je n’en suis pas sûre, je dirais plutôt qu’on essaie d’innover en partant de ce qui fonctionne, de ce que les gens aiment, c’est-à-dire danser, valser, s’amuser, oui, ça, c’est sûr, les Parisiennes aiment cela encore plus et en fait, ce que nous cherchons vraiment à faire, comme ce soir, ici, c’est transmettre ce goût du beau. C’est un événement ancré dans la tradition, certes, parce qu’on ne construit rien sans le passé, mais il faut vivre le présent et le futur et pour ça, Charles, qui est le directeur artistique du bal, innove au quotidien pour transmettre sa passion de la valse. Pour moi, par exemple, le ballet m’amène dans une  dimension particulière … c’est comme si, avec les danseurs du ballet, le bal prenait  son envol ! C’est ce qui le dynamise. Et il y a tous les ingrédients ; vous avez vu, le cadre, la technique, les belles tenues, la musique, les voix. Ça fait partie du rituel viennois, l’opéra, le ballet et on essaie de l’adapter à notre temps, au goût parisien ! »

 

BAL N°11 Isabelle Grozelier BAL N°12 - 4 couples

 

Et comment une première (longue) partie de soirée se terminerait-elle autrement que par un hommage à l’esprit même de Vienne ? Alors, sur le traditionnel « Alles Walzer », l’ensemble des spectateurs est invité à rejoindre les Débutants sur la piste, pour la Valse de l’Empereur, hommage à l’emblématique empereur d’Autriche (c’est le centenaire de sa mort) et de son épouse Sissi. Quant aux plus courageux, ils iront se coucher à cinq heures du matin, après avoir dansé rock, west coast swing et tango… Je n’étais plus de ceux-là !

«  À peine entré, je me lançais dans le tourbillon de la valse, cet exercice vraiment délicieux m’a toujours été cher ; je n’en connais pas de plus noble ni qui soit plus digne en tout d’une belle femme et d’un jeune garçon ! » (Alfred de Musset – Confessions d’un enfant du siècle, 1837).

 

 

Par Jean-Louis Lorenzo,  journaliste de radio et de télévision. Aujourd’hui retraité, il a exercé ce métier pendant près de 40 ans, aussi bien en France métropolitaine que dans les stations d’Outre-mer : Amérique latine, Afrique de l’est, Océan Indien. Il a longtemps exercé en Aquitaine où il fut rédacteur-en-chef de la station de Radio France (France Bleu Gironde). Il a publié plusieurs ouvrages, les trois derniers puisés dans le terroir bordelais.

 

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Secrétariat de rédaction Colette Fournier

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