Alors que l’élection présidentielle américaine se rapproche, Pluton-Magazine a interviewé Dr. Algernon Austin sur la campagne. Hillary Clinton est-elle impopulaire parmi les jeunes électeurs noirs ? Pourquoi certains noirs américains sont-ils susceptibles de voter pour Trump? Que représente cette élection pour les électeurs noirs alors que le président Obama est sur le point de quitter la présidence ? Pouvez-vous imaginer Trump gagner et quelles seraient les conséquences?
Dr Algernon Austin est sociologue et chercheur au Centre pour des solutions politiques globales à Washington D.C. Auteur et consultant, il travaille sur les questions raciales, économiques et politiques depuis deux décennies.
« Nous vivons une campagne historique. Jamais les deux principaux candidats d’une élection présidentielle n’ont été aussi impopulaires auprès du grand public américain. Avant Donald Trump, beaucoup auraient pensé qu’une personne se comportant comme lui ne pourrait jamais être candidate aux primaires d’un grand parti et encore moins devenir le candidat investi. Il a mis en doute les faits d’armes du sénateur John McCain et insulté la famille d’un vétéran de guerre qui a donné sa vie en servant dans l’armée des États-Unis. Il y a quelques années, tout le monde aurait affirmé que de telles déclarations de la part d’un candidat étaient rédhibitoires. Cela n’a eu que peu de conséquences sur les soutiens dont bénéficie Trump. Par le passé, les intellectuels ont affirmé que les commentaires racistes devaient se faire de façon subtile pour que leurs auteurs puissent ensuite les démentir mais Trump a commencé sa campagne en traitant les immigrants mexicains de violeurs. Il a ensuite poursuivi dans le même registre et a commencé à s’en prendre aux musulmans. La liste des groupes qu’il a offensés est longue mais le nombre de ses supporteurs n’a fait que croître avec le temps.
Hillary Clinton est, selon moi, une femme politique relativement conventionnelle. Elle est probablement plus intelligente et plus controversée que la moyenne. Certes, elle est proche des élites économiques mais c’est le cas de tous les présidents et des principaux candidats à l’élection présidentielle dans l’histoire des États-Unis. Bien entendu, Donald Trump a lui aussi de nombreux liens avec les élites économiques, les Clinton y compris. Elle a pris certaines mauvaises décisions mais c’est également le cas des autres hommes et femmes politiques. Franchement, je ne comprends pas vraiment la haine qu’elle suscite. Je dirais que ses principaux « défauts » sont les suivants : (1) elle n’est pas aussi extravertie et proche des gens que d’autres hommes et femmes politiques, ce qui laisse penser qu’elle cache quelque chose ; (2) c’est une femme et ce fait réveille les préjugés et le sexisme de la société américaine ; et (3) elle est l’épouse de Bill Clinton et est donc depuis longtemps la cible de la haine de l’extrême droite. Cette haine a visé Michelle Obama ces huit dernières années car elle a fait d’« horribles » choses, comme essayer d’inciter les Américains à manger des légumes et à faire de l’exercice.
Hillary Clinton est bien vue par les électeurs noirs. Mais je crains que les défauts qu’on lui prête ne limitent leur enthousiasme à son égard. Les jeunes sont souvent moins engagés politiquement et ceux qui s’intéressent à la politique savent que Clinton a soutenu des politiques pénales et de santé qui ont désavantagé les Afro-américains. Certains de ces jeunes gens soutenaient Bernie Sanders. Toutefois, il convient de noter que, selon un sondage du Black Youth Project, parmi les jeunes Américains, les Afro-américains sont ceux qui soutiennent le plus Hillary Clinton.(http://genforwardsurvey.com/assets/uploads/2016/08/GenForwardAugust2016Toplines_final-1.pdf)
Il existe des conservateurs, des républicains, des xénophobes et des islamophobes noirs qui pourraient voter Trump mais peu de noirs apprécient Trump, ceci pour les mêmes raisons qui font que beaucoup de blancs l’apprécient.
Je pense que beaucoup d’Afro-américains se souviendront de l’époque Obama avec la fierté qu’ils ont ressentie tout au long de sa présidence. Lui et sa famille font figure d’exemple de ce que les Afro-américains peuvent faire de mieux. Pour la majorité des noirs, Barack Obama fait donc maintenant partie de l’histoire afro-américaine.
Actuellement, Trump rattrape son retard sur Clinton. Il peut gagner, notamment si de nouvelles surprises viennent ternir l’image de Hillary Clinton ou remettre en question ce qu’elle représente.
Qui sait à quoi ressemblerait une présidence Trump ? Sa campagne a été organisée à la hâte et fut erratique. Je crains qu’il en soit de même pour son administration. Les seules choses qui semblent vraiment l’intéresser sont son image et ses finances. Les Américains devront veiller à ce que Trump ne se serve pas de sa présidence pour enrichir ses entreprises, ce dont il a déjà été accusé au cours de sa campagne (voir, par exemple, http://dailycaller.com/2016/08/23/trumps-campaign-rent-skyrocketed-after-rnc/).»

There are black conservatives, black Republicans, black xenophobes and black Islamophobes who might find Trump appealing. A very small number of blacks like Trump for the same reason many whites like Trump.
At this moment, Trump is gaining on Clinton. He can win. Particularly if there are more surprising events to tarnish Clinton’s image or to question her character.