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Par Georges COCKS
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Michel N’Youngou Christophe est né en Guadeloupe, même si son nom suscite énormément de curiosité́. Il a longtemps vécu aux États-Unis, et depuis deux ans, il est de retour chez lui et il n’est pas rentré tout seul. Il traîne avec lui une pluie d’étoiles d’ouvrages qui nous permettront de découvrir l’auteur prolifique et dynamique qu’il est. Pluton Magazine a décidé́ d’ajouter pour vous un questionnaire dans ses bagages.
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PM : Pourquoi ce retour, Michel ?
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Je suis rentré chez moi en Guadeloupe pour me retrouver, me reconnecter à ma famille, et me réinventer. Je ne voulais pas terminer ma vie comme fonctionnaire, mais comme entrepreneur, et je voulais vivre mes valeurs. Nos plats, le lien social, la nature, et une connexion avec ma terre natale, tout cela me manquait terriblement.
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.PM : Est-il facile de vivre autant d’années loin de sa terre natale ?
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Facile, non. Mais pendant trente ans, cela a été nécessaire pour travailler et développer mes compétences. Je profitais de mes deux semaines de vacances annuelles pour venir voir ma famille, prendre un bain de mer, un bain de rivière, et il fallait déjà repartir.
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PM : Après tant d’années, les choses ont-elles évolué ici ?
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Oui. La Guadeloupe d’aujourd’hui a très peu de choses à voir avec celle que j’ai quittée il y a plus de trente ans. Sous bien des aspects, elle a évolué, et sous d’autres, elle a régressé. Le niveau d’éducation de la population semble avoir augmenté, l’organisation et le comportement de nombre de nos compatriotes se sont professionnalisés. Mais nos villes semblent appauvries, vidées de leur vigueur. L’individualisme avec son corollaire, « Chacun roule pour sa gueule », a gagné du terrain, et ce changement-là ne présage rien de bon pour notre développement commun.
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PM : Tu as une façon différente de promouvoir tes ouvrages, peux-tu nous en dire plus ?
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Une façon différente de promouvoir mes ouvrages ? Je ne sais pas ce que les autres font. Dans ma communication, j’utilise des passages de mes livres, des témoignages de lecteurs, des vidéos, des booktrailers, des images, et je propose aussi ces services à ceux que ça intéresse. Mais, je trouve quand même la question difficile, car je ne sais pas vraiment ce que font les autres. Ça fait longtemps que je n’attends pas grand-chose des maisons d’édition, même si l’une d’entre elles édite un de mes livres. Je suis un auteur hybride. De toutes les façons, je dois faire connaître mes histoires. Personne n’aura plus à cœur que moi-même de trouver une audience pour mes bébés, ce n’est pas une simple histoire de fric, c’est une histoire de partage, d’identité et de communauté.
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PM : En quoi consistaient tes interventions en université́ ?
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Au début de ma carrière universitaire, j’enseignais la composition anglaise, et la langue française. Par la suite, je me suis spécialisé dans le leadership, la gestion du changement, le planning stratégique et la gestion du conflit. Je faisais énormément d’interventions en entreprise.
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PM : Tes (ou ta) plus belles rencontres littéraires là-bas ?
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Un soir, dans la rue, à Chicago où j’étais pour une conférence, un jeune Noir interpelle les passants. Il cherche à vendre un livre qu’il a écrit. Il ne m’intéresse pas, donc je passe mon chemin. Le jeune homme me poursuit et insiste. Je lui refile dix dollars pour avoir la paix, et il me donne un exemplaire du livre. De retour à ma chambre d’hôtel, j’y jette un œil, puis commence à le lire comme ça sans attente particulière. Il relate une période difficile de la vie de son auteur. Malgré les coquilles, je ne ferme pas l’œil de la nuit. Au petit matin, je le dépose enfin, et cherche à envoyer un message à l’auteur pour lui dire à quel point j’ai apprécié son histoire. Le jeune homme n’est pas connu, et il n’écrira plus jamais, mais je tiens à l’encourager quand même et surtout à lui dire l’effet que son histoire a eu sur moi.
J’ai rencontré Wolé Soyinka, Maryse Condé, Toni Morrison, et beaucoup d’autres auteurs encore, mais c’est cet inconnu sans prétention qui m’a le plus marqué. Il avait une histoire à raconter, en laquelle il croyait. C’était son histoire, donc elle était importante, assez pour qu’il la couche sur le papier, et qu’il descende dans la rue pour la vendre. Son engagement m’a réellement inspiré. Nous avons tous des émotions et des histoires à partager, et le faire parfois est une question de vie ou de petite mort.
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PM : Pas seulement auteur, tu es aussi coach, explique-nous ce que tu fais et comment tu concilies les deux ?
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Oui, je suis coach exécutif, formateur en leadership transformationnel, linguiste, auteur, et maintenant j’aide les auteurs dans la conception de leur ouvrage. J’accompagne de façon routinière des managers, des chefs d’entreprise, des entrepreneurs, et des collaborateurs qui cherchent à accomplir de grandes choses. Tout le monde peut en bénéficier. Je les aide à obtenir ce qu’ils désirent. Je dispense également des formations en leadership transformationnel à ce même public et ainsi contribue à l’amélioration de la qualité du leadership dans mon île. Je les aide à optimiser la productivité de leurs équipes. À travers l’écriture, le coaching, le leadership, ma finalité est d’inciter les gens à transformer leurs peurs, faire preuve de davantage d’audace, s’épanouir et arrêter de vivre en apnée. Mes activités sont une extension de qui je suis. Aucune antinomie, la finalité reste la même : met moun doubout.
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PM : Le monde du livre est-il plus facile là-bas qu’ici ?
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Oui, et non. Avec une population de 329,5 millions d’habitants, chacun peut trouver son public s’il professionnalise sa production ; bien sûr, il y en a pour tous les goûts. L’autoédition est très répandue là-bas, comme l’est l’utilisation des liseuses et des ebooks. Même à 99 centimes, un livre peut rapporter gros à son auteur si les gens l’aiment. Beaucoup d’auteurs commencent comme ça, puis une fois qu’ils vendent beaucoup, ils finissent par se voir sollicités par les grandes maisons d’édition de New York qui veulent tirer profit de la manne financière qu’ils représentent. Inversement, pour se faire publier par une grande maison d’édition, il faut déjà avoir un agent littéraire respecté, être connu, et bénéficier du poids économique d’une importante communauté derrière soi. L’agent littéraire gardera un pourcentage des revenus, comme l’éditeur et sa maison d’édition, le distributeur, et l’imprimeur. Au bout du compte, les revenus de l’auteur seront amoindris, d’où le choix assez courant, même chez ceux qui ont été édités traditionnellement, de s’essayer à l’autoédition.
Aux États-Unis, les auteurs me semblent plus solidaires. Pendant des années, j’ai appartenu au Writer’s Center, un groupe composé de 3500 participants et plus dans la région de Washington, https://www.writer.org/, organisés en association, qui se rencontraient une fois par mois pour se soutenir et échanger. Les stages, et autres retraites, les writing centers abondent et offrent de l’assistance et des cours d’écriture aux auteurs. Ceux qui font des best-sellers viennent parfois à la rencontre des autres pour répondre à leurs questions et leur donner des conseils.
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PM : Tu travaillais pour le gouvernement américain, avec un droit de réserve, que faisais-tu ?
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Au sein du gouvernement américain, je formais des espions et des diplomates. Nous participions à la lutte contre le terrorisme. Et je faisais aussi les mêmes choses qu’auparavant, c’est-à-dire, la gestion du changement, du planning stratégique, la gestion des conflits, du team-building, ainsi que de la formation en leadership transformationnel. Le gouvernement dispose de plusieurs universités et de centres de formation pour ses fonctionnaires, et quand je n’étais pas en mission sur le terrain autour du monde, je travaillais dans l’un d’entre eux.
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PM : Comment vois-tu l’avenir du livre en Guadeloupe ?
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Je refuse de croire que mon peuple ne lit pas. Ce qui est palpable c’est que, sauf clientélisme, il ne consomme pas suffisamment les productions littéraires locales. Ne pas lire du tout le vouerait à un rôle de sempiternel subalterne. La lecture reste un des plus puissants ferments de l’apprentissage, qui lui seul permettra notre émancipation. Notre relation au livre détermine ce qui est encore possible pour nous, en termes de transcendance intellectuelle et sociale. Je reste confiant : tant que les gens auront besoin d’évoluer, le livre aura un bel avenir. Il changera peut-être de support, au profit de l’audio ou du numérique, à voir, mais les histoires qu’il véhicule continueront de nous émouvoir.
Nous avons hâte de lire les ouvrages de Michel et surtout cette plume tranchante qui parfois reste nue comme si, quelquefois, la pudeur est le charme que le sentiment d’être couvert ne peut point révéler. Disponibles sur les plateformes digitales, vous n’aurez aucun mal à vous les procurer. Nous savons déjà̀ que ce charisme de coach et cette générosité d’auteur se feront ressentir dans le monde littéraire en Guadeloupe. Restez connectés à son actualité́ !
Et retrouvez-le déjà pour un premier rendez-vous à The Factory, à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe FWI) le 30 juin à 17 h. Il sera accompagné de trois autres auteurs, un quatuor à ne pas rater !
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Rédacteur Georges Cocks
©Pluton-Magazine/2022/Paris 16eme
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Par Georges COCKS
Écrivain- Éditeur-Poète-Romancier
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