Léïla Brédent : soprano divine, la belle du chevalier de Saint-Georges

   

Cette belle Guadeloupéenne, comme celle chantée par Malavoi (La Guadeloupéenne)  ou celle de Francis Cabrel (Leïla et les chasseurs), est la cible de leurs flèches, mais ce n’est pas eux qu’elle cherche. Son cœur et sa voix caressent son chevalier, un musicien violoniste virtuose, un compositeur de sonantes et un chef d’orchestre hors pair : Joseph de Bologne de Saint-Georges, plus connu sous le nom de chevalier de Saint-Georges.  À l’âge où les filles traînent encore leur poupée, Leïla Brédent s’amusait avec les claviers du piano. La musique était déjà son souffle de vie et très rapidement, elle acquit la certitude que sa voie, elle l’avait déjà tracée.  Entourée de perles et d’étoiles, elle est devenue un talent promis à un avenir prestigieux.  Elle dérange le silence d’une façon si harmonieuse, puissante et convaincante, que personne n’oserait lui demander de baisser le ton. Bien au contraire, Pluton Magazine a dû attendre la fin du récital pour lui parler en tête-à-tête.

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PM : La première fois en tout ne s’oublie pas,  le 31 janvier 2019 était une date exceptionnelle, parlez-nous de ce souvenir ?

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Effectivement, le 31 Janvier dernier, j’ai eu l’occasion de me produire pour la première fois au Schomburg Center de New-York, soutenue par l’orchestre “Ensemble du monde,” orchestre international, sous la direction du maestro Marlon Daniel, chef d’orchestre américain qui a joué dans des lieux prestigieux en Europe et aux États-Unis, du Carnegie Hall à New York au Rudolfinum de Prague. J’ai reçu un accueil chaleureux et étais heureuse de la standing ovation.

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PM : Molière Athalys, qu’est-il pour vous, Léïla ?

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Molière Athalys est mon maître de chant. Son enseignement a été juste et très complet. Il m’a préparée vocalement mais aussi mentalement pour mener une carrière de chanteuse lyrique. C’est lui qui a cru en moi et en mes capacités avant que je n’y croie moi-même. C’est au moment où nos chemins se sont croisés que j’ai su que je ferais ce métier, avec lui comme guide. Il est et restera mon seul maître de chant !

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PM : Rencontrer Barbara Hendricks, c’est comme l’enfant qui rencontre le père Noël ?

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Rencontrer Barbara Hendricks était un honneur ! J’ai eu la chance d’avoir été choisie par elle pour faire la première partie de son concert en Guadeloupe. Elle a été très généreuse. Si j’ai un souvenir de ce moment que je pourrais partager avec vous, ça serait celui où elle a dit à la fin de son concert qu’elle avait été heureuse de partager la scène “avec sa jeune collègue” en parlant de moi.    

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PM : Parlez-nous de  la troupe du chevalier de Saint-Georges, avec qui vous cavalez depuis un certain temps.

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Tout est parti d’une audition que j’ai passée à Paris pour le chef d’orchestre Marlon Daniel. À la suite de cette audition, il m’a donné l’opportunité de me produire pour un Concert Mozart avec le grand Orchestre, au Théâtre Européen de Pazarcik, en Bulgarie. Ayant déjà collaboré avec moi par le passé, il a pensé à moi au moment de la création de son projet du Festival International de Musique Saint-Georges en Guadeloupe, dont la première édition a eu lieu l’année dernière en 2018.

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PM : Vous chantez dans combien de langues ? Vous les pratiquez souvent ?

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J’ai déjà interprété des morceaux dans cinq langues mais aussi en créole, aussi bien en Guadeloupe qu’à Paris, et en basque avec des chanteurs basques qui, pour certains, sont de renommée internationale ! J’utilise le latin pour la musique sacrée. Je pratique ces langues au gré des pays que je visite.

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PM : Lorsqu’on entend une voix pareille, on se dit qu’elle ne mange que du miel et ne chante pas du RNB ou  du HIP HOP, pour ne pas l’abîmer (sourire), est-ce vrai ?

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Il faut en effet une bonne hygiène de vie pour préserver son corps et sa voix, comme d’autres sportifs d’ailleurs ! Je n’ai toutefois pas d’aliments proscrits, tout est une question d’équilibre.

Je suis née en Guadeloupe, j’ai donc été bercée par le Zouk, la biguine, le Kompa mais aussi par le RNB, le Hip Hop et le Rap que nous pouvions capter sur les chaînes du câble venant des États-Unis. Ce sont des styles musicaux que j’écoute encore mais je ne chante que du lyrique !

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PM : Avez-vous déjà écrit vos propres compositions ?

L’écriture dans la musique classique est une discipline à part ! De plus, cela demande un temps considérable et des années d’études (une quinzaines d’années). Je me consacre à mon métier qui est de chanter.

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PM : Nous restons toujours sans voix lorsque nous vous écoutons, d’où ce silence cinglant, dites-nous en quelques mots comment vous faites pour en arriver là ?

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Le travail !

J’ai une formation musicale. J’ai étudié le piano plus jeune et par la suite, j’ai suivi des études de musicologie, ce parcours est un plus pour ma pratique du chant, aujourd’hui, mais seule la technique que m’a transmise mon maître de chant m’a permis d’être là où j’en suis.

Je m’entraîne tous les jours. Un jour je peux me concentrer sur un passage très technique d’une partition qui demande plus de temps d’intégration, et un autre travailler sur un programme entier.  Le temps d’apprentissage d’une partition est variable et ne peut être déterminé en amont. Tout dépend du nombre de pages et de nombreux autres paramètres, tels que l’écriture et la technique à maîtriser pour restituer le morceau, tel qu’il a été écrit et pensé par le compositeur. Je m’entraîne le plus souvent chez moi. Il m’arrive également de chanter chez des amis qui ont un piano et qui m’invitent à utiliser leur espace pour répéter. Lors de mes répétitions avec des chefs de chant ainsi qu’avec mon maître de chant, je me déplace sur leur lieu de travail.  

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PM : Mis à part vos séances d’entraînement, avez-vous des interdits alimentaires ?

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Je n’ai aucun interdit alimentaire, si vous avez une solide technique, quand vous la mettez en œuvre, elle marche.

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PM : Peut-on perdre cette vocalité puissante avec le temps ?

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Le corps vieillissant, on modifie son répertoire en fonction de l’âge. Il en va de même pour la marche ou tout autre exercice. La solidité de la tête, la pratique de la concentration, la méditation peuvent vous permettre beaucoup de choses.

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PM : Comment envisagez-vous l’avenir ?

Je rêve de chanter dans le monde entier !

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PM : Vous êtes une chanteuse de la scène mondiale maintenant,  pouvez-vous partager votre agenda avec nos lecteurs ?

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J’ai un récital avec le pianiste Simon Carrey le 10 Avril prochain à Paris. Puis viendront Londres, Orvieto en Italie, et l’agenda se remplit. J’invite les passionnés d’opéra à me suivre sur ma chaîne Youtube et Facebook.

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PM : Quelle est la plus grande contrainte pour vous ?

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Être loin de ma famille et de mon île. Il faut faire énormément de sacrifices pour faire ce métier mais cela vous fortifie.

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PM : Qu’aimeriez-vous dire à tous ceux qui vous admirent comme un modèle à suivre ?

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« Il faut suivre ses rêves et être prêt à beaucoup travailler. On n’a rien sans travail »

Merci Léïla,

Nous ne nous lasserions jamais de cette magnifique tessiture que Leïla Brédent nous offre généreusement. Comme un devoir commémoratif  du sang patriotique, elle a rendu un vibrant hommage au chevalier de sa cour guadeloupéenne, originaire de la ville de Baillif (en Guadeloupe), le chevalier de Saint-Georges, commandant au sein de l’armée de la République. Il laisse derrière lui une vraie histoire chevaleresque à faire tomber les dames, par son habileté à l’épée et sa fuite avant qu’une mort prématurée ne le rattrape. C’est Léïla qui succombe à sa bravoure. Le Festival International de musique de Saint-Georges s’est déroulé en Guadeloupe du 16 au 20 mars 2019. L’occasion était ainsi offerte à tous de mettre  plusieurs notes sur les plaques qui portent son nom ici et là, et de lui redonner le pupitre et la baguette de direction pour nous indiquer le tempo, la mesure et les attaques, dans une gestuelle franche et énergique.


Cocks Georges
Secrétariat rédaction Colette Fournier (Lyon)
©Pluton-Magazine/2019/Paris 16eme

Suivre Léïla Brédent sur sa chaîne Youtube ou sa page facebook

Photographies : Léïla Brédent

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