Georges COCKS
Combien de maladies existe-t-il dans le monde aujourd’hui ? De combien de maladies souffrez-vous en ce moment ? Difficile à dire. Cependant on peut évaluer de 6000 à 8000 le nombre de maladies rares qui touchent un individu sur 2000. Les causes sont diverses et variées. Problèmes génétiques ou auto-immunes, dans certains cas on ne sait pas la cause de la maladie, l’âge n’étant pas un facteur référent et la recherche coûtant excessivement cher, ce qui explique que seules 5 % d’entre elles bénéficient d’un traitement curatif.
Tous malades
Oui. Seulement 4,3 % de personnes au monde ne présentent pas de maladie ni de handicaps selon un rapport du Global Burden of Disease Study (GBD ou étude mondiale sur le fardeau de la maladie). La GBD est l’étude épidémiologique observationnelle internationale. Cette étude décrit la mortalité et la morbidité des principales maladies, blessures et facteurs de risque pour la santé au niveau mondial, national et régional. Selon elle, 95,7 % des humains portaient, il y a cinq ans, le fardeau d’une maladie aiguë ou chronique, ou encore une blessure, une lésion ou un dommage physique, étude menée dans 188 pays.
Créée dans les années 1990, la GBD est pilotée par un groupe d’étude international soutenu par l’OMS, avec l’objectif de collecter le maximum de données épidémiologiques existantes sur les maladies dans différents pays du monde. L’objectif étant de fédérer tous les travaux scientifiques réalisés dans le monde a alors émergé, et la première collecte des données épidémiologiques relatives à la période allant de 1990 jusqu’à 2010 a été publiée en 2012. Une autre série de données a été publiée en 2015. Depuis, et grâce à l’évolution des moyens technologiques, des travaux de recherche ont pu générer et synthétiser plus de 9 milliards d’estimation de données et les groupes d’étude se sont engagés à publier des actualisations annuelles des études GBD.
La GBD fournit des estimations de haute qualité des maladies et blessures, plus rigoureuses que celles publiées par les organismes de sensibilisation aux maladies spécifiques.
Elle se penche notamment sur l’examen des causes principales de mortalité, de décès prématuré, d’années de vie perdues (AVP), d’années de vie ajustées en fonction de l’incapacité (AVAI), d’années vécues avec incapacité (AVI), pour croiser ces données et calculer par exemple :
– le nombre d’années qu’une personne d’un âge donné peut s’attendre à vivre en bonne santé, en tenant compte de la mortalité et de l’incapacité ou encore de l’espérance de vie en bonne santé, ou espérance de vie ajustée en fonction de l’incapacité,
– le pourcentage, dans un pays ou une région, de décès prématurés, d’invalidité ou AVAI causés par un grand nombre de maladies et de blessures par groupe d’âge et sexe pour une période de temps donnée.
– le pourcentage de perte de santé par pays ou région, attribuable à certains facteurs de risques par groupe d’âge et sexe pour une période de temps donnée…
Ces outils sont utiles non seulement pour favoriser la compréhension des observations majeures de l’étude GBD, mais également pour aider les instances gouvernementales à élaborer la fondation des modifications des politiques en matière de santé.
L’impact de l’environnement naturel, le travail, la santé physique et mentale, et la politique (guerre) sont pris en compte. Tous ces facteurs dressent un bilan très lourd, même si des progrès énormes sont réalisés, et montrent à quel point les efforts d’aujourd’hui sont loin d’être suffisants pour améliorer la situation sanitaire mondiale. On retrouve des données communes entre certains pays mais l’Afrique subsaharienne reste globalement au-dessus du lot.
Malheureusement, il se trouve que là où les choses devraient aller pour le mieux, c’est tout le contraire qui se passe. Dans le monde du travail, le recul des acquis sociaux au détriment des salariés est aggravé par des nouvelles lois annexées au Code du Travail, qui viennent accentuer le fardeau mondial. Loi, transformations profondes et inadéquate des instances de protection des salariés (CHSCT), pouvoir des actionnaires, équipements mal adaptés… trop peu d’entreprises aujourd’hui prennent soin de leurs salariés. Souvent, ce sont les grands groupes et les multinationales qui induisent une profonde souffrance au travail. La détérioration de la santé mentale (harcèlement, dépression, burnout…) accentue les AVP et AVI, et plonge les individus dans des abysses tels que l’alcoolisme qui est un des facteurs de décès important, sans oublier la dépendance à des produits stupéfiants en tout genre. Les maladies professionnelles sont de moins en moins reconnues et prises en charge par les acteurs de la santé publique. La mutation du travail vers la digitalisation induit des maladies sournoises et invalidantes dues à la charge de travail et l’absence de pauses suffisantes pour éviter les maladies ostéoarticulaires. Ainsi, les troubles musculo-squelettiques occupent trois des principales 25 causes d’invalidité en 2015 : les douleurs du cou et du bas du dos sont la première cause d’invalidité (en AVI, fardeau) au monde, avec un fort pourcentage chez les 15-39 ans.
Échelle d’incapacité
L’évolution galopante de la croissance et de la consommation continue d’aggraver la situation mondiale de la santé, quel que soit l’endroit où l’on se trouve dans le monde.
La pollution de l’air, par les manufactures et les moyens de transport, tue et coûte des milliards en une année. Rien que pour la France, cela représente l’équivalant de 2-4 % du PIB.
L’alcool est le septième facteur de risque de décès prématuré et d’invalidité dans tous les groupes démographiques, car il induit d’autres maladies en plus de provoquer la mort directe par accident.
Contrairement à ce que l’on faisait croire, l’infection par le VIH ne recule pas. C’est le triste constat établi lors de la 21e conférence internationale sur le sida, qui s’est tenue à Durban en Afrique du Sud. La GBD 2015 dresse un tableau plus noir : elle dénombre ainsi 2,4 millions de nouvelles infections en 2015 dans le monde, contre 2,1 millions relevées par l’Onusida. Il souligne également que 74 pays ont connu des augmentations des nouvelles infections entre 2005 et 2015. Parmi eux l’Egypte, le Pakistan, le Kenya, les Philippines, le Cambodge, le Mexique et la Russie.
Dans la grande éprouvette bleue, nous avons fait l’alchimie de nos maux, nous avons créé nos maladies par la curiosité, par une volonté insatiable de profit et la cupidité. Maladie des os de verre, de l’homme de pierre, syndrome de Lowe, pyoderma gangrénosum… la liste des maladies rares semble interminable. L’introduction de substances chimiques d’origine naturelle ou artificielle étrangères à l’organisme, principalement dans la nourriture, induit des effets néfastes sur l’organisme et sont responsables de nombreuses maladies, et sont probablement à l’origine de nouvelles dont on ne sait encore rien. Appelés perturbateurs endocriniens, elles sont partout, on ne peut y échapper. Nos objets du quotidien, notre alimentation, l’air, l’eau… nous sommes pris à notre propre piège. La vérité, c’est qu’il n’y en a pas, et peu d’espoir de revenir à une terre saine. Le système de santé serait-il aussi responsable de la défaillance du système immunitaire des individus ? Se gaver de médicaments pour un rien par peur de tomber malade a-t-il un sens ? Pourtant les maladies bénignes aideraient à renforcer notre immunité au lieu d’encourager l’industrie pharmaceutique au profit. La polémique autour des vaccins fait rage, tout serait une question de gros sous ? Une chose qu’il faut retenir, c’est qu’un médicament est un poison à faible dose, calculé pour ne pas vous tuer ; voilà pourquoi il est important de respecter la posologie. Par conséquent il est naturel qu’il vous cause un dommage pour en réparer un autre.
Les gens qui ne tombent jamais malades ne sont pas, ou peu, génétiquement différents de nous. Ils sont en fait acteurs de leur santé. Ils adoptent des gestes simples pour se prémunir contre les virus saisonniers. Sans être des maniaques de la propreté, ils n’assainissent pas complètement leur environnement afin de stimuler leurs défenses immunitaires de façon continue. Par exemple, se laver de façon excessive avec des savons qui ne sont pas neutres favorise les maladies de peau. Ils font attention à leur alimentation, en mangeant peu, c’est-à-dire un tout petit peu moins qu’à leur faim, en cuisinant des aliments frais et complets le plus souvent possible, et en buvant beaucoup de liquides chauds non alcoolisés. Ils font du sport, respectent leur alimentation et favorisent le repos, quitte à faire une courte sieste s’ils en ressentent le besoin, le sommeil étant très important. Enfin, ils affichent une attitude positive envers le stress qu’ils parviennent à contrôler. Ils ont des amis, une vie sociale équilibrée, parfois même spirituelle. Malheureusement, cela ne suffira pas à guérir tous les malades de la planète.
Georges Cocks (rédacteur et correspondant permanent Guadeloupe)
Secrétariat de rédaction Colette Fournier (Lyon)
©Tribune/Pluton-Magazine/2018/Paris 16eme
Sources :