Confession d’un professeur de danse : ce que m’a appris une de mes élèves sur le pouvoir du remerciement

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Par Alain Dobrah Michigan (Autriche)

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« Presque plus personne n’écrit de note de remerciement. Mais parfois, envoyer un texto n’est pas acceptable alors qu’envoyer des remerciements par courrier traditionnel le serait sûrement. Bien sûr, certains diront que cela ne compte plus beaucoup, mais est-ce tout à fait vrai ? Ce dont je suis sûr, c’est qu’il est plus facile d’arrêter de se souvenir de ce qui compte, comme d’un remerciement par exemple, quelle que soit la facon choisie pour l’exprimer.

Je n’ai pas la nostalgie du bon vieux temps, comme s’il était meilleur qu’actuellement. Il ne l’était pas dans bien des domaines. Chaque jour qui passe, j’essaie tant bien que mal d’équilibrer mon désir d’évoluer sans pour autant rejeter les leçons du passé, comme la gratitude envers ceux qui m’ont aidé á évoluer et à devenir le danseur, professeur de danse et chorégraphe que je suis devenu … Le résultat, malgré ce que peuvent raconter certains, malgré le mythe de l’autodidacte, est toujours un travail d’équipe où chacun apporte sa contribution au but final ,aussi minime soit-elle… Un travail acharné avec ses hauts et ses bas sans la certitude de réussir, d’atteindre le résultat escompté ou tout simplement d’obtenir quelque chose d’acceptable. Un challenge où seule la passion guide nos pas sans oublier les rencontres, les regards bienveillants… et les applaudissements d’un public, qui éclatent au moment le plus inattendu.

 

 

 

Il y a quelque temps, alors que je revenais d’un cours qui n’avait pas marché malgré ma bonne volonté ou tout simplement à cause de mon manque de patience envers mes élèves ce jour-là… alors que la frustration commençait à prendre trop de place dans mon esprit avant que ne s’installe le doute, une jeune femme m’aborda d’un grand sourire. Elle semblait me connaître sans que je puisse pour autant mettre un nom sur ce visage inconnu qui se présentait à moi. Dans mon métier, je rencontre beaucoup de gens, mais assez rarement leur souvenir et surtout leurs noms me restent en mémoire… Je joue le jeu de celui qui se souvient. Elle me raconta qu elle suivait mes cours il y a 5 ans avant de partir pour New York oú elle décida de continuer vers le théâtre comme actrice. Bien que cette profession soit éloignée de celle du danseur professionnel selon elle, elle trouva dans mon enseignement les instruments qui lui permirent de progresser dans sa nouvelle profession. Je ne me souviens pas très exactement de ce que je lui ai répondu car déjà l’arrivée à sa station mit un terme à la conversation, aussi vite qu’elle avait débuté … Petit intermède d’un moment en suspension trop brusquement terminé sans que je puisse dire merci ou tout simplement répondre « de rien » á l’expression de sa gratitude. Avant que ne redémarre le bus, elle se retourna vers moi en me faisant un signe de la main. Je n’oublierai jamais son regard m’exprimant sa reconnaissance pour ma contribution, bien que je ne sache plus vraiment ce que j’ai bien pu faire pour mériter ce cadeau.

 

Il y a des conversations que l’on n’oublie jamais ou tout simplement qu’on veut garder dans sa mémoire pour ce qu’elles nous apportent de positif dans ces moments bien précis de notre vie où tout semble s’écrouler en cascade … À ce moment bien précis, cette conversation-là me redonna foi dans mon travail. Avec la conviction que tout ne se perdait pas pour autant malgré ces instants de doute, de frustration où seul l’abandon semble être l’unique remède. En ce sens, cette belle inconnue s’avéra être mon professeur en me redonnant cela ce jour-là.

Dommage que je n’aie pas pu la remercier pour cet instant, même si court. Stylo à papier ou autre aurait fait l’affaire… Ce qui compte en fait, c’est d’exprimer sa gratitude en trouvant le temps de le faire, quels que soient les supports utilisés. En tout cas, vous resterez dans mon cœur juste pour cela. »

Merci de m’avoir lu.

 

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Alain Dobrah Michigan (Autriche)

Secrétaire de rédaction Colette FOURNIER (Lyon)

Pluton-Magazine/2019/(Paris16)

 


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