En un fracas.
Des murs, des murs, encore des murs James noël,
nous invite à sa Migration des murs.
La Migration des murs
Ce n’est pas tous les jours
qu’on parle des murs
Attention sujet tabou
Là-dessus, c’est tout le monde
qui fait le mort.
EXTRAITS
Celui qui prend à sa charge un
problème si haut par le bas finira
par tout mettre à plat sur la question
des murs Par osmose et éboulement
inverses, il obtiendra la mise à mort
du plan de chantier et pourra graver le mot gravier,
le mot mortier sur
une stèle.
Les murs ont des agents doubles
et des cadres très haut placés sur le
marché Les murs ne pensent pas,
mais possèdent un lot de crimes
aveugles dont les auteurs intellectuels
se heurtent à la myopie de la justice
Les murs peuvent alors se dispenser
de penser, avec autant d’auteurs
intellectuels
C’est à exploser les tympans,
à contrarier les rires des
contremaîtres qui ne savent plus
ce que mesurent le mot mesure
et le monde de fer de la démesure
des murs Un mur qui tombe,
par principe, n’écoute pas de prière,
il emporte tout sur son passage
Jusqu’à nos jours, il n’y a que le mur
en état d’ivresse ou de chute libre,
qui sache calquer, sans catafalque,
le bruit écrasant de la mort
S’arc-bouter sur la vie, en prendre
ombrage sans laisser nulle place
au soleil S’arc-bouter d’un bout
à l’autre sur la vie, la chevaucher,
lui faire peur sous des kilomètres
de bétons armés Voilà de quoi est
faite la psycho d’un mur couché à plat
ventre sous le soleil
Le cœur est une chambre double
Et dans le domaine de l’amour, les
murs font chambre à part pour mieux
brouiller les pistes Ils prennent leur
pied au fur et à mesure que les corps
prennent racine dans leur décollage
sans décolleté, leur état second qui
monte haut et même parfois jusqu’au
plafond Face à l’orgasme, les murs
sont très sceptiques (ils haussent
les épaules sans craquement)
D’ailleurs, les murs n’aiment pas
cette courte échelle
James Noël
« James Noël, né en 1978 à Hinche (Haïti), est un poète aux visage multiples. Toujours sur un chantier, il est le maître d’œuvre d‘IntranQu’îllités (1), un monstre de revue. Contre les nouveaux défis qui nous menacent, il propose un enragement comme forme d’engagement suprême. Auteur d’une quinzaine de livres, il occupe une place emblématique dans les lettres haïtiennes contemporaines. Grand rongeur des méridiens, souvent entre deux avions, cet auteur polyvalent a sombré dans la prose depuis le séisme qui a frappé Haïti en 2010.
C’est à Rome, où il a vécu une année comme pensionnaire à la Villa Médicis, qu’il a frappé en premier ce pamphlet protéiforme contre les murs.
Il est aussi un rassembleur, doublé d’un passeur, qui avance sur le sable mouvant de l’imaginaire. En novembre 2015 est parue sous sa direction une anthologie de poésie haïtienne contemporaine regroupant 73 poètes vivants, dans la collection de poche Points Seuil. Deux de ses titres, Le Sang visible du vitrier et Le Pyromane adolescent sont réédités dans la même collection.
Ses textes sont souvent lus et interprétés par des acteurs et des musiciens comme Wooly Saint-Louis Jean ou encore Arthur H.
Noël vit à Port-au-Prince. » Galaade Editions
Pluton-Magazine/2017
Copyright: Une Promenade en poésie/2017
Photo slide: Le Palais Sans-Soucis (Haïti)
Liens:
– https://www.franceculture.fr/emissions/poesie-et-ainsi-de-suite/poesie-et-migrations
– http://www.rfi.fr/emission/20170205-james-noel
Notes:
- (1) IntranQu’îllités (Revue artistique et littéraire dirigée par James Noël aux éditions Zulma)