Par Dominique Lancastre
Avec, Johnny Hallyday, répète si t’as des couilles, paru au deuxième semestre 2021, le journaliste et essayiste Serge Bilé revient sur les années yéyé et l’ascension de Johnny Halliday en Afrique. Le livre est assez surprenant par le nombre d’anecdotes qu’il contient car ce n’est pas un ouvrage uniquement dédié à Johnny Halliday mais beaucoup d’autres chanteurs et chanteurs y sont mentionnés. Mais, ce qui fait l’originalité de l’essai, c’est la capacité de l’auteur à nous livrer des informations jusqu’à maintenant peu connues sur l’influence de la musique européenne en Afrique.
Comme les jeunes Européens, les jeunes Africains ont intégré assez rapidement le mouvement yéyé, au point que certains gouvernements sont montés au créneau pour interdire ce mouvement musical qu’ils considéraient comme contestataire et qui de ce fait mettait en péril l’ordre social.
Serge Bilé nous explique, avec par moment beaucoup d‘humour, l’influence de la musique sur la situation politique, et on découvre une Afrique différente, l’Afrique francophone à une époque que l’on ne connaît qu’à travers les instabilités politiques et les différents clashs coloniaux. Il va jusqu’à faire une petite excursion en Afrique du Sud pour souligner l’Apartheid, ce qui permet de situer l’ouvrage dans son contexte géopolitique global.
Le livre peut être considéré comme un hommage à Johnny Halliday mais on découvre le chanteur dans un cadre différent et les différents concerts et les différentes visites du chanteur ne laissent aucun doute sur le fait qu’il portait le monde noir dans son cœur.
Un essai ne se raconte pas mais s’apprécie et c’est que j’ai fait en lisant cet ouvrage, pas d’un seul trait, mais en le feuilletant comme un album de famille un samedi-midi, et non sans avoir de temps en temps un sourire au coin des lèvres car le livre nous rappelle vraiment ces albums de famille aux pages collantes où l’on découvre l’accoutrement des parents d’un passé révolu et l’on ne peut alors s’empêcher d’éclater de rire en scrutant ces pantalons pattes d’éléphants et ces chemises à fleurs avec de grands cols pelle à tarte.
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Nous ne découvrons pas uniquement cette musique yéyé qui met en ébullition toute une génération mais aussi une façon de se comporter, de parler, de se mouvoir et c’est le grand Johnny qui en est le fer de lance. À côté de lui, nous découvrons aussi la mode ; la mini-jupe est aujourd’hui banale mais il faut s’imaginer ce grand changement dans la façon de s’habiller des jeunes de l’époque. Une mini-jupe et des bottes qui feront le voyage jusqu’en Afrique.
Et puis, l’auteur fait allusion à tous ces magazines qui existent toujours et qui faisaient rêver les jeunes alors. Peut-être qu’aujourd’hui, sur leur Smartphone ou encore sur Instagram et d’autres réseaux, car nous sommes en présence d’une nouvelle génération, les jeunes téléchargent la photo de leurs idoles mais à l’époque ils collaient leurs posters dans leurs chambres.
Le yéyé est un mouvement qui libère le corps mais aussi l’esprit et l’auteur souligne que certains gouvernants n’appréciaient guère ce genre de direction qui était susceptible de mettre des idées de révolution dans les jeunes têtes.
Ce qui est très intéressant dans cet ouvrage, c’est qu’il montre la façon dont une génération influence son époque et comment un seul homme peut changer des milliers de personnes, car la musique est universelle et elle sert à faire passer beaucoup de choses importantes ; elle sert de pont.
La structure de l’ouvrage permet une lecture ponctuelle et parcimonieuse et on peut facilement quitter l’ouvrage et y revenir après car il se présente un peu comme un documentaire avec plusieurs séquences de tournage. Les photos en noir en blanc qui illustrent la fin de l’ouvrage permettent de se faire une idée de la présence de Johnny Halliday en Afrique et de comprendre comment il y était le bienvenu.
Un livre à découvrir pour ceux qui s’intéressent à Johnny Halliday et à l’Afrique et au-delà à notre société en général et à la manière dont elle fonctionne.
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Dominique Lancastre (Ceo Pluton-Magazine)
Pluton-Magazine/Paris/2021
S.A.S Pluton