Wobass ou Barbara Felettig, une fréquence de graves extraordinaire

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Par Georges COCKS

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Que serait la musique sans basse ? Ce serait de la musique qui resterait fort appréciable car toutes les musiques ou toutes les chansons n’en possèdent pas sous la forme de basses fréquences telles que nous l’entendons, mais certains instruments en produisent. Si on enlevait les lignes de basse sur les chansons Billie Jean ou Wanna be starting something de Michael Jackson, on se rend compte immédiatement que le jeu de cordes ne serait pas le même, n’est-ce pas ? Aujourd’hui, tous les instruments et le matos qui entourent le rendu des basses fréquences sont à la pointe de la technologie. Nos home cinémas aussi ne jurent que par elles. Mais si nous apprécions tant nous laisser vibrer grâce à elles comme une membrane dans son saladier, c’est pour la simple et bonne raison qu’il y a des doigts de fées qui savent jouer avec les cordes pour jouer de nos corps. Nous avons voulu rencontrer une musicienne à part entière que vous êtes des millions à suivre et à apprécier pour son talent grandiose. Pluton Magazine invite Barbara Felettig alias Wobass à déposer sa guitare le temps de cette interview pour mieux comprendre la magie de ses performances de guitariste.

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PM : Votre première guitare a certainement une belle histoire à nous raconter ?

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J’ai commencé la basse à 15 ans donc assez tard ! J’ai pris 4 ans de cours de basse à mes débuts mais j’avais déjà un bagage musical et j’avais commencé la guitare en autodidacte quelques mois auparavant. L’achat de ma première basse relève un peu du hasard : j’avais déjà dans l’idée d’en jouer mais n’avais pas encore engagé un réel processus. Lors d’une promenade dans un vide-greniers, je vois un vendeur de guitares et de basses… ça n’a pas fait un pli ! C’était une Ibanez Roadster made in Japan des années 80 comme on n’en fait plus. Je l’ai revendue par la suite et je le regrette aujourd’hui car elle avait une valeur sentimentale importante… Je regarde de temps en temps sur les sites de petites annonces pour voir si je ne la retrouve pas !

Mes parents ne pensaient pas que je consacrerais ma vie à la musique… C’est une volonté que j’ai émise vers mes 20 ans. Avec leur accord, j’ai fait une pause d’un an dans mes études pour voir si cela se maintenait dans le temps… Il faut croire que oui !

Depuis ce jour, ils sont très fiers de moi, mes premiers fans comme on dit…

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PM : On vous connaît en tant que bassiste, jouez-vous à d’autres instruments de musique ?

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Je joue de la guitare, de la batterie, un peu de piano et de contrebasse, et je me suis mise à la flûte traversière en novembre 2020. Mais chaque instrument demande du temps afin de le maîtriser un tant soit peu correctement et c’est sur la basse que je passe le plus de temps, c’est clairement mon instrument favori.

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PM : Nous savons que vous jouez de tout, et que vos origines sont loin d’être tropicales, alors expliquez-nous pourquoi vous avez une sensibilité particulière pour la musique antillaise, et pas n’importe laquelle ?

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C’est assez difficile à expliquer… Je suis arrivée par hasard dans la musique antillaise il y a quelques années et depuis, c’est le grand amour ! C’est une musique très intéressante pour les bassistes car elle fait appel à la fois au soutien pur (par exemple, dans Zouk-la sé sèl médikaman nou ni (Kassav), la basse joue uniquement la note sol tout du long… c’est très simple et c’est en premier lieu le rôle du bassiste : faire le lien entre le rythme et l’harmonie (sans en faire trop) mais aussi à la musicalité. On retrouve évidemment ce double-rôle dans beaucoup d’autres styles. Mais je suis loin d’être une spécialiste, ça ne fait que quelques années que je joue de cette musique et j’ai encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’en maîtriser toutes les subtilités.

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PM : Comme beaucoup de musiciens, vous avez certainement une ou plusieurs influences qui marquent votre travail ?

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Il y a des bassistes qui m’ont marquée à différentes périodes de ma vie mais je ne suis pas sûre que cela se ressente réellement dans mon jeu. Je mets un point d’honneur à garder l’esprit et les oreilles ouverts. Tout est bon à prendre dans chaque style de musique. Un bassiste de funk aura d’autres compétences qu’un bassiste de salsa qui lui-même aura d’autres compétences qu’un bassiste de métal.  Il faut aller piocher à droite à gauche pour enrichir sans cesse son jeu et ainsi pouvoir appliquer ce vocabulaire à tel ou tel genre de musique.

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PM : Kim Deal, Espéranza Spalding, Kim Gordon, Tina Weymouth… toutes des femmes dans l’arène masculine, nous spectateurs nous nous régalons de vous voir mais comment vivez-vous personnellement cette nouvelle présence féminine qui s’impose de plus en plus sur la scène ?

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J’ai eu quelques remarques sexistes, oui. D’ailleurs, la plupart partent d’une bonne intention : le célèbre « tu joues bien pour une fille ». A contrario, le fait d’être une femme peut aussi être un « atout » car il y a le côté « curiosité ». On m’a déjà dit plusieurs fois « on avait le choix entre plusieurs bassistes mais on t’a choisie toi parce que tu es une femme »… On pourrait appeler cela de la discrimination positive. Je suis assez perplexe face à cela. Je souhaite que l’on m’embauche pour mes compétences et non pour mon genre… De plus, à l’ère des réseaux sociaux, on voit de plus en plus de musiciennes, notamment chez les bassistes donc ça ne devrait plus être un critère de choix. À compétence égale, on s’émerveille toujours plus devant une femme qui joue bien d’un instrument, quel qu’il soit, que devant un homme…

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PM : Avez-vous des demandes de collaborations par des artistes ou des maisons de production ?

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Tony Chasseur m’avait contactée afin de participer au concert filmé « Tony Chasseur fait son Paris d’artiste » qui a été diffusé le 17 avril 2020 sur Culturebox. Il est à ce jour toujours disponible en replay de manière illimitée et est régulièrement retransmis sur différentes chaînes de France Télévisions.

On me contacte aussi régulièrement pour des sessions d’enregistrement en studio. Certaines aboutissent, d’autres pas…

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PM : Barbara, vous jouez dans un groupe ?

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Oui, j’en ai plusieurs : j’ai un groupe de rock Telephone Tribute  : un groupe hommage au grand groupe de rock français Téléphone. Nous sommes constitués de la même formule : un chanteur/guitariste, un guitariste, une bassiste, un batteur. Ambiance rock assurée ! Big Bass Band : un orchestre composé de 8 basses, un batteur, un percussionniste et une slameuse dans sa forme complète. Tout a été initié, créé et composé par Frank Nelson (bassiste d’origine haïtienne). Il existe aussi des formules duo et quatuor. Kapa Negra : un orchestre de musique portugaise avec des incursions dans divers pays lusophones. Il fait partie des références dans ce milieu. Charme Latino : un orchestre de musique portugaise plus récent mais prometteur ! Essentielle : un groupe essentiellement féminin. Seule la batterie est tenue par un homme. Répertoire dansant mais aussi plus calme et jazzy pour les parties cocktails. J’y effectue des remplacements. Prodige : producteur, compositeur, arrangeur, joueur de talk-box avec qui j’ai travaillé sur son album P 2.0. En est notamment sorti ce titre  Forget this girl dont nous sommes assez fiers, sur lequel j’ai composé la basse et la guitare.

Tout cela me fait jouer des musiques différentes et c’est ce que j’apprécie.

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PM : Pour vous, quels sont les ingrédients pour devenir un bon guitariste de basse ?

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Il faut être à l’écoute de tous les musiciens du groupe. C’est vrai pour n’importe quel instrument mais encore plus pour la guitare basse vu qu’elle est ce fameux ciment entre le rythme et l’harmonie. C’est un rôle primordial. Il faut aussi savoir rester à sa place, ne pas en mettre trop ou au contraire, quand le moment le justifie, épicer sa ligne de basse.

 Rudolphe Nasso, Chanteur, Musicien et Bassiste Guadeloupéen du groupe Hot-Sound :

« J’ai découvert Barbara dite Woobass sur YouTube comme tout le monde. Je crois et je suis toujours aussi fasciné de voir d’autres peuples et cultures s’imprégner de la nôtre. Cette musicienne d’origine métropolitaine m’a toujours scotché d’autant plus qu’elle choisit non pas les lignes de basse des plus simples, mais des plus ardues telles que la Perfecta, Sakyo, avec le fameux solo de Michel Alibo sur le titre Bisous sucrés qui est une tuerie qu’elle reproduit fidèlement, Don d’organes, un titre de Tony Chasseur, joué par monsieur Thierry Fanfan, certains morceaux de Kassav joués par Georges Décimus ou des morceaux de Frederick Caracas… enfin que des légendes qui ont révolutionné le zouk. Honnêtement, ça me fait toujours autant d’effet comme quand j’avais été jouer en Angola avec le chanteur Harry Diboula quand un frisson m’a traversé le corps quand j’ai vu ce peuple, colonie portugaise, chanter Tu me manques de manière phonétique en chœur et par cœur, j’en tremble encore.   Quoi qu’il en soit, il faut le reconnaître, cette bassiste a un énorme potentiel.  C’est une future très grande, en plus elle joue de la contrebasse. Je lui dis merci encore de promouvoir notre musique et lui envoie un big fos ! »

@rudolphenasso

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PM : Comment vit-on cette période de pandémie sans évènements quand la musique est toute sa vie ?

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Ce n’est pas une période simple depuis mars 2020, surtout qu’il y a toujours une inconnue dans l’équation : lorsque les dates reprennent, on ne sait pas pour combien de temps. On a toujours des annulations potentielles qui planent au-dessus de nos têtes. Le monde artistique a beaucoup souffert et souffre encore de la crise sanitaire et le public aussi en a assez de cette situation. Tout le monde a envie de retourner voir des spectacles afin de s’évader un peu. On vit dans un monde assez anxiogène depuis un an et demi. Les artistes invoquent tout simplement le droit d’exercer leur métier et le public celui de prendre du plaisir en assistant à des représentations.

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PM : Votre meilleur concert, et votre plus belle rencontre ?

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Le concert « Tony Chasseur fait son Paris d’artistes »…  Je crois que j’ai vécu toutes les émotions possibles entre le moment où il m’a appelée pour me proposer le boulot et la diffusion télévisée du concert. Je ne remercierai jamais assez Tony de m’avoir fait confiance pour cette grosse prestation, sans avoir jamais travaillé avec moi auparavant. C’était clairement un pari ! Et grâce à lui, j’ai rencontré des musiciens exceptionnels.

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PM : À part la musique, Barbara aime quoi dans la vie ?

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Des choses simples : me promener dans la nature, regarder des films, lire des livres…

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PM : Avez-vous déjà un calendrier d’évènements à nous proposer avec la reprise timide des prestations artistiques ?

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Nous avons repris les prestations mais le contexte sanitaire peut influencer le calendrier, c’est pour cette raison que nous demandons à tous ceux qui nous suivent de garder le contact via nos différents réseaux Facebook et Instagram.

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PM : Le projet qu’il vous tient à cœur de réaliser aujourd’hui ?

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Devenir une bassiste sur qui on peut compter les yeux fermés.

Tony Chasseur, Chanteur, Musicien, Auteur-Compositeur martiniquais :

« Barbara « Wobass » est une sorte d’OVNI dans la musique afro-caribéenne.

Elle apparaît il y a quelques mois, via un buzz sur les réseaux sociaux, en proposant des visites de lignes de basse issues de titres célèbres de ces musiques « riches et métissées ».

On ne peut qu’être séduit par cette démarche, et le talent évident de la bassiste. Je le suis, pour le coup.

Passant du virtuel au réel, la rencontre avec la musicienne dévoile d’autres pans. Du talent, en effet, de l’assise, de la précision et du sérieux dans le travail musical à fournir. Mais aussi de la discrétion, une forme de timidité et beaucoup de sensibilité, à fleur de peau, touchante et émouvante.

Wobass fera un long et beau parcours dans ce métier, à n’en pas douter. Et cela commence déjà plus spécifiquement dans les musiques afro-caribéennes. Si mon invitation sur scène lui permet des ouvertures de portes, j’en suis ravi. Mais le mérite de son succès, actuel et futur, reviendra à son talent et sa personnalité’’.

@tonychasseur

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Barbara, cette jeune femme talentueuse et généreuse de surcroît a tout pour porter son nom qui a déjà une belle sonorité parmi les icônes comme : Ron carter, Paul Mc Cartney et Cliff Burton… Il nous tarde qu’elle devienne l’indispensable ligne de basse de tous nos tubes et nous apporte un peu d’évasion dans la centrifugeuse du monde actuel. Musicienne professionnelle, elle réside actuellement en Île-de-France et dispense des cours à tous ceux qui veulent débuter ou se perfectionner en basse et en guitare mais aussi à travers le monde via Skype. Quelques écoles de musique de Seine-et-Marne lui ont accordé sa confiance. Certains musiciens la voient remplacer n’importe quel bassiste pour n’importe quel groupe en tournée et nous partageons profondément cette conviction. On l’adore quand les fréquences basses commencent à frôler les 20 Hz.

Merci Barbara,  

Nous te disons à très bientôt sur la scène ; nous n’avons pas à Pluton Magazine la plume de Prévert mais nous voulons te prédire également :

Rappelle-toi Barbara

Le soleil brillait en Île-de-France ce jour-là

Et tu marchais souriante

Épanouie ravie ruisselante

Ta basse en bandoulière sur le dos

Rappelle-toi Barbara

Tu souriais sans cesse

Et nous nous souriions tous aussi avec toi

Rappelle-toi Barbara… ton rêve est déjà là.*

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Rédacteur Georges Cocks

©Pluton-Magazine/2021/Paris 16eme

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Par Georges COCKS
Écrivain- Éditeur-Poète-Romancier

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Instagram : @wobass_b

Contact professionnel uniquement : wobass@yahoo.com

Crédits Photos :  avec l’aimable autorisation Wobass

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